Sergueï Pougatchev: “La Grande-Bretagne est assez corrompue et très lente à la détente”

L’ex-sénateur Sergueï Pougatchev raconte à la chaîne Dozhd l’attentat dont il a été victime en Angleterre.

L’ex-espion russe Sergueï Skripal et sa fille Ioulia ont été empoisonnés au moyen d’une substance paralysante, rapporte le journal The Guardian, qui cite des sources proches de l’enquête.

“Espion”, “traître” – pour certains ces mots sont synonymes, a dit Sergueï Pougatchev dans un commentaire au sujet de l’empoisonnement de l’ancien espion en Angleterre. Selon lui ces incidents relèvent des affaires internes des services spéciaux et il incombe aux services spéciaux du pays dans lequel l’incident s’est produit d’enquêter là-dessus.

Pougatchev a rappelé qu’il a lui-même fait l’objet d’une surveillance étroite des services spéciaux, et que lui-même et sa famille ont été victimes d’un attentat à Londres. Il a remarqué que l’Angleterre peut sembler un pays très démocratique, mais du fait que de nombreux Russes y maintiennent leurs avoirs et y achètent des biens immobiliers, le pays est, de fait, passablement corrompu. Dans son propre cas l’enquête n’avait pas été menée comme il convient. On lui a simplement proposé de fournir une protection rapprochée, dont il disposait déjà. Les éléments de l’affaire ont été transmis à la France, parce que M. Pougatchev est citoyen français.

Vous avez vécu en Angleterre. Avez-vous fait l’objet de poursuites, de surveillance, éventuellement de tentatives d’assassinat?

Avant tout, je tiens à préciser que je ne suis pas un ancien membre des quelque service spécial que ce soit, que je n’ai jamais travaillé dans les services, est que c’est une histoire un peut différente. A mon sens c’est une affaire “miroir”, qui a la même apparence quel que soit le pays. Evidemment, lorsque vous commencez à travailler pour le KGB, vous savez à quoi vous vous engagez. Si vous retournez votre veste, eh bien, le terme “espion” et le terme “traître” sont synonymes pour certains. Et pour moi, ce qui se passe est une affaires entre services spéciaux, et donc c’est aux services spéciaux de l’Etat dans lequel les choses se sont passées de gérer la situation.

S’agissant de ma personne, j’ai effectivement fait l’objet d’une surveillance étroite des services spéciaux. A Londres j’ai été visé par un attentat, ma famille et mes enfants également. Je tenais simplement à dire que la Grande-Bretagne, qui accueille aujourd’hui près de trois cent mille Russes les plus fortunés, qui y ont déposé leurs avoirs, ont acheté des biens, notamment de l’immobilier, et ainsi de suite… cette Grande-Bretagne peut apparaître, vue de Moscou, comme très démocratique et très libre. Mais en réalité c’est un pays passablement corrompu et plutôt lourd à la manoeuvre.

Lorsque l’attentat a eu lieu j’ai eu affaire aux officiers du SO15, le département anti-terroriste. Ils m’ont dit franchement, dès l’abord, qu’ils avaient un budget extrêmement réduit, qu’ils n’avait pas d’argent et qu’ils ne pourraient sans doute pas mener une véritable enquête. Le maximum qu’on puisse faire, m’a-t-on dit, c’est vous assurer une protection rapprochée; mais j’en disposais déjà, de toute façon. L’affaire s’est éternisée à n’en plus finir, puis a été classée sans suite. Ils m’ont adressé une lettre, m’informant que puisque j’étais citoyen français, ils allaient transmettre tous les éléments du dossier à la justice française. Une enquête pénale a été ouverte en France, qui est en cours d’instruction.

Beaucoup ont encore des illusions au sujet de la Haute Cour de Londres, de la police anglaise, etc. Je voulais simplement rappeler que cela ne correspond nullement à la réalité.

Vous aviez donc le sentiment d’être véritablement en danger? Êtes-vous en mesure de dire par qui vous étiez suivi?

Oui, bien sûr, le danger était réel. Des engins explosifs pesant entre 1,5 et 3 kilogrammes ont été trouvés sous toutes mes voitures. C’est un crime sérieux. D’ailleurs, ces voitures, portant des engins explosifs, se trouvaient en plein centre le Londres, dans le voisinage du parlement, de la Haute Cour et ainsi de suite. Et donc, en fin de compte, je me suis retiré des affaires de justice qui étaient en instance là-bas, j’ai quitté la Grande-Bretagne et je suis rentré en France.

Avez-vous une quelconque certitude? Savez-vous s’il s’agissait d’autres ennemis que vous pourriez avoir, ou bien s’agissait-il des services spéciaux russes? Ou bien des personnes que ces services auraient payées? Il peut y avoir différentes versions…

Vous savez, il y a beaucoup d’hypothèses. Précisément celles que vous venez d’énumérer: soit les services spéciaux, soit des gens que ces services auraient engagés. Mais avant les conclusions de la justice française… je ne peux évidemment pas décider de ce qui s’est vraiment passé à la place du juge français. En France, par exemple, le secret de l’enquête est un véritable secret, c’est un fait. Ce qui veux dire que je ne sais rien des détails de l’instruction, même si l’enquête progresse, que des interrogatoires sont menés et ainsi de suite.